Jeux littéraires

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samedi 21 octobre 2023

Guide d’utilisation de la ville de Varsovie à l’usage des poètes de passage, #2

Jouer de transparences pour s’enfoncer bas où les entrailles tressaillent

Guide d’utilisation de la ville de Varsovie à l’usage des poètes de passage, #1

Pointer haut la poésie pour rabaisser les gratte-ciel triomphants

samedi 15 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #20

Clap ! la pellicule claque
dans le projecteur
— la lumière aveugle
les derniers cinéphiles
plus d’images qui bougent
    avec les mots
mais rien ne presse
: pour qui ne goûte pas
    l’été canicule
tous les chemins
mènent à
    Reykjavík

vendredi 14 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #19

Sans cesse joue du rabot
frotte la pierre — découpe
les sommets les entraves
allume ton foyer aux
étincelles de tes frottements
d’artifice — cloute tes
chaussures pour mieux accrocher
    pendant l’ascension
secoue-toi si tu t’endors
hé ! de repos il sera question
quand les montagnes auront des cheveux
grisonnant d’expérience

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #18

De loin tout se pare
d’un fascinant panache
or se cachent des secrets
    inavouables
    ou honteux
    voire joyeux
    (mais ce n’est pas votre affaire
    de toute façon)
dans les alcôves de lave
qui ne se partagent pas
    au monde
: la monstration sur
dazibao numérique
a un goût de pierre ponce
qui râpe les papilles
& donne envie de
vivre à fond en dehors

jeudi 13 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #17

Dessication
lente du pois-
son au vent frais
— yeux rivés sur
le design in-
ternational
du bord de mer
: surtout ne pas
idéali-
ser le passé

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #16

Comment ça
tous les chemins mènent
quelque part ? les fossés
veillent au grain, voyons
— ils allument le voyant
de la curiosité pour
mieux le faire passer
    au rouge ensuite
quelque part c’est alors
nulle part & partout
    (oups ! ça sonne comme
    un discours de motivation
        managérial)
; même dans le néant
on trouve toujours un endroit
où on n’ira jamais

mercredi 12 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #15

L’île de Viðey appartient
aux pattes qui se lèvent tôt
    ; qui déposent la fiente
de bonne heure
hors des bruits de la ville
loin des navires de croisière
    qui la surplombent
— grouillant d’excréments à vider —
sans même la voir

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #14

Pour lier vagues & bosses
dans l’harmonie des milles & kilomètres
marin & cycliste
font tourner leur vélice
— voire, plus écologique
    : leur vélivoile
tendue au vent & aux mollets
s’exclamant nez dans le guidon & le foc
« à nous les lointains
    horizons ! »
mais les horizons s’éloignent
    en mirages
marin & cycliste
se massent alors
à l’huile de foie de morue & de genou
pour briller au soleil du repos
pour sentir le vent frais sur leurs corps
écailles dorées & mollets épilés
sous les cris des sternes & du goudron brûlant

mardi 11 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #13

Puissance tellurique des poètes
    : gare !
l’une se fâche ?
    tremblement de terre
mais que deux se rencontrent &
    éructe le volcan

(eh oui : https://grapevine.is/news/2023/07/10/an-eruption-has-started-on-the-reykjanes-peninsula ; et la radio nationale islandaise a aimé la photo : https://www.ruv.is/frettir/menning-og-daegurmal/2023-07-14-lidur-mer-vel-med-thetta-eda-finn-eg-fyrir-einhverjum-aulahrolli-387916)

lundi 10 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #12

Moi morue
bien au froid dans mon banc
n’ai que faire
des odes qui me sont lancées
sous forme de chalut
    ; je me débats
    dans le courant spirale
— on tranchera vif dans
ma chair blanche
sous des latitudes
de vin vert
    alors bon
    le lyrisme…

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #11

Fêtards avinés
dans la nuit d’été
glissent sur un en-
lacement serré
qui défie le temps

dimanche 9 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #10

L’eau est partout :
source de vie ;
bain primordial ;
soupe originelle
d’où nous nous sommes levés
— l’eau coule ou stagne
& comme ce quelque chose
    de pourri
dans le royaume du Danemark
il se sent une odeur
    d’œuf pourri
dans la république d’Islande

samedi 8 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #9

À mi-cordée on
ressent le collectif au mieux
; ventre mou de la conquête
    qui
passe par d’innombrables
existences invisibles —
on grimpe ou
    rame ou
        mouline
souquez ferme ! les
moussaillons sont de la
graine d’explorateurs qui
jamais n’éclora, ou
si peu — & puis les pics
se plantent dans des rivages
    encore inconnus (enfin :
autochtones exceptés)
& la découverte se transforme en
symbole métallique luisant
après des siècles
après des contes
après des livres d’histoire
    un rien tronqués
& on a beau le savoir
les tridents de bord de mer
ils ont quand même de l’allure

vendredi 7 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #8

Passe presto pressé
échappe aux rues peuplées
dans des impasses subreptices
où paraissent parfois des
perles de temps anciens
— pour parfaire ton camouflage
peins-les de rouille &
entre les rouleaux
pérégrine bien souple
    mais surtout
perds-toi plan
dans un présent trop plat
    … ou vice-versa ?

jeudi 6 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #7

L’aventure c’est l’aventure
vante le musée
conscient de la concurrence
effrénée d’un chasseur de trésors
    désormais octogénaire
    — mais toujours cinégénique —
oui
: l’aventure c’est l’aventure
trop souvent amerloque
    désormais
götur, stræti & vegir bruissent des accents
du Texas et de l’Indiana
les hot-dogs sont érigés
    en totems
l’aventure c’est l’aventure
& voilà déjà
bien plus de trois décennies
qu’est mort Lino Ventura

mercredi 5 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #6

Pour rallumer les étoiles
prière d’attendre :
le pas de tir
vers l’espace
brinquebale sous les coups de boutoir
du centre de la Terre


(Eh oui, ça bouge !)

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #5

Commodément immergé
dans une eau à 38 degrés
un verre à la main
le sage pontifie :
« seul le chemin importe —
toute destination est illusion —
toute déviation, bénédiction »
Survient alors le simple :
« mais moi, j’ai mal aux pieds ! »
La morale s’en remet
    à votre sagacité

mardi 4 juillet 2023

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #4

Tu peux bien
frapper la tôle ;
hurler au vent ;
inscrire tes doléances au manteau des
    cheminées
ou
    sur des hôtels de luxe…
l’esthétique des profondeurs
traverse toujours les strates géologiques
pour se dissiper
vers le ciel
en un panache
    plus résolu
que tes envies de surface

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #3

Hop ! pensait la fillette
sur les chemins de terre noire
« mes genoux écorchés
c’est un apprentissage »
    ; aujourd’hui
pulsée d’électrons
elle fuse sur les trottoirs clairs
Hop ! — les mollets
striés de boue sombre
le vent & le passé dans le dos
vive la fluidité
au diable l’innocence
Hop ! hop ! hop !

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #2

Barbare suis
quand je croque la pomme
    importée
– la géothermie substitution
au climat tropical ?
non, mais les transhumances
plantent des graines
de Veda dans les sagas
& les portes s’ouvragent
à mesure que se mélangent
les cultures des papilles

Reykjavík en photos et poèmes sans filtre, #1

Des héros partout
& leurs tunnels d’admiration
creusés dans des édredons bien chauds
les petites fleurs — les petits oiseaux
    du lyrisme
brûlés au soleil de la nuit absente
« une bonne guerre », dit
le grand-père aux
petits-enfants les yeux dans le coltan
    : foutaises
laissons les statues
comme des reliques
& cultivons
ce qui ne croît pas jusqu’au ciel
laissons les statues
& attendons les extraterrestres
(pour leur montrer l’exemple)
laissons les statues
— les vrais héros
ce sont les doux
— les vraies héroïnes
ce sont les douces
& pour ça
pas de piédestaux

mardi 23 mars 2021

These Foolish Things

these foolish things.jpg, mar. 2021

Le 21 mars 2021 a eu lieu à l’abbaye de Neumünster un concert en hommage à Michel Petrucciani, regroupant Franck Avitabile au piano, José Fallot à la basse électrique, Étienne Brachet à la batterie et Baptiste Herbin aux saxophones soprano et alto — alors que la plupart des pays d’Europe n’autorisaient toujours pas les concerts. Voici une impression en poème d’un des morceaux, joué en duo piano-saxophone, qui se trouve ne pas être de Michel Petrucciani : These Foolish Things, composé par Jack Strachey.


sont-elles essentielles
these foolish things
le clapotis des berges
le doigt passé sur un écran
une falaise creusée centenaire
— les notes qui vont &
viennent dans un théâtre à
demi plein, non ! peut-être
au tiers… anche cordes pavillon
pédales — sont-elles alors
essentielles, ces vibrations
vraies plutôt que gravées
des bémols dans les sinus
sous les masques variés ?
elles s’insinuent dans les tympans
these foolish things
réminiscences de vieux vinyles
& par-delà les frontières aux
théâtres clos se déhanchent
pour rappeler que l’essentiel
n’a pas forcément d’odeur
mais un timbre — un reflet
sur du laiton, sur du bois verni
une harmonie dans l’écoute

jeudi 11 octobre 2018

Un sixain à diérèses : « Salaire minimum ! »

Le métier de poète
rapporté au taux horaire
m’incite à faire moi-même
le ménage pour au moins
avoir l’illusion de
gagner ma vie proprement.

mardi 15 août 2017

Sans titre, sur un tableau de Martine Deny

Tableau de Martine Deny, www.denyart.com. Texte extrait de la performance « Impossible Readings 9 » au Kulturschapp de Walferdange, organisée par le collectif Independent Little Lies.

Tu voudrais que je chausse des escarpins
que je me dénude les jambes jusqu’à l’endroit
où monteraient tes caresses
sur une douceur tout embaumée de crème
au parfum de spot télévisé de multinationale
qui t’a vendu le rêve de jambes douces
de musique suave pendant l’amour
quand tu reviens épuisé

Tu croirais m’exciter par tes allées et venues
là où passerait ta main
calleuse pourtant
je sais que ça fait débander mais je te le dis
parce que moi je voudrais
que tu mettes des gants
que tu regardes la réalité en face

Il y a des poils sur mes jambes
il y a de la corne sur tes mains
quand tu rentres et que tu crois que je n’ai fait
que t’attendre en regardant
des publicités suaves et des musiques de multinationales
en préparant mes cuisses douces à tes caresses

Plutôt que des escarpins
je voudrais chausser des baskets
partir avec toi dans un long jogging
transpirer suer dégouliner d’effort puis
nous déshabiller en désordre
faire l’amour dans la sueur abondante

Merde aux multinationales !

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