Parfois, en relisant un livre dans le cadre d’un projet particulier, on tombe sur un poème déjà coché et dont l’effet est toujours là, toujours aussi fort. C’est ce qui m’est arrivé avec ce poème de Massimo Barilla, extrait d’Ossa di crita (Os d'argile), publié en 2020. Je n’en mets que la version en dialecte de Reggio de Calabre, mais le livre est bilingue, avec des traductions en italien — les deux textes ont permis les choix pour l’interprétation en français.
lu tempo da sarvizza
Dassa parrari la notti
pi vidiri si veni
lu tempu da sarvizza
a manu chi queta lu ventu
u sonnu chi accarizza
Dassa parrari la notti
lu scuru senza stiddi
e scuta cu li mani
a filu di luci nova
li vuci di dumani
Dassa parrari la notti
mantenici corda e spago
tenila,
supra lu pettu
tenila,
idda non pigghia sonnu
idda non perdi ciatu
Dassa parrari la notti
e serbaci palori scanusciuti
cunsacrati cu acqua
nira di cielu
e sucu di rangi amari
le temps du salut
Laisse parler la nuit
pour voir si advient
le temps du salut
une main qui calme le vent
un songe qui caresse
Laisse parler la nuit
l’obscurité sans étoiles
et écoute avec les mains
au fil de la lumière nouvelle
les voix de demain
Laisse parler la nuit
fournis-lui corde et ficelle
tiens-la,
sur ton sein
tiens-la,
jamais elle ne sombre dans le sommeil
jamais elle ne perd le souffle
Laisse parler la nuit
garde-lui des paroles inconnues
consacrées par l’eau
le noir du ciel
et le jus d’oranges amères