Léo Beeckman est né en 1948 et mort en 2017. Infatigable promoteur des lettres belges dans plusieurs associations, créateur d’un fonds de plusieurs milliers d’ouvrages destiné à présenter la littérature belge dans les foires et les salons, il a aussi été éditeur. Et puis il a écrit ce court recueil intitulé Poème quantiques, retrouvé après sa mort, dans lequel sont évoqués les « fractures du temps », le « vortex », l’ubiquité du poète qui, tel un électron qui peut se trouver dans plusieurs positions à la fois, contemple le monde de ses vers courts et percutants pour dire une vérité que les tracas quotidiens font ignorer à ceux qui ne s’abreuvent pas de poésie. Les époques se mêlent, les règnes animal, végétal ou minéral se fécondent. Douze poèmes, c’est tout. Simples, concis, qui vont à l’essentiel. Mais un choc du style et du discours qui perdure longtemps après la lecture.

Poèmes quantiques, Léo Beeckman, maelstrÖm, ISBN 978-2-87505-272-8.
Ce livre fait partie de la collection 4 1 4, qui propose d’acheter deux exemplaires collés entre eux. Le deuxième livre est tout simplement à offrir.


Poème quantique VIII

Pour Étienne Minoungou

Nous sommes
La civilisation noire
La civilisation goudronnée
La terre rouge
Et la poussière
Nous sont devenues étrangères
Au mépris
Des lois sauvages
Nous avons construit
Des abattoirs
Et nous avons emballé
La mort
Sous cellophane
Nous avons mis
Nos espoirs
Dans des coffres
Et nos avoirs
Dans des cartes
Pour manger à crédit
Et pour mourir
Le ventre plein

Or
un jour
J’aurai la peau noire
Et je porterai cette peau
En signe de libération
Car je serai à nouveau
Cet homme ancien
Qui se souvient de la terre
De la place
Qui lui revient
Et de ses origines minérales.