Repoussoir mécanique des sans-entailles, tu presses la scie contre le bois
:
des écailles de sciure s’en vont dans le matin calme, & puis les
grincements
propagent des ondes de choc — il y avait hier tes pieds nus sur les
aiguilles,
le pin vomissait l’ombre, l’oiseau donnait de la voix sans autre pensée
que
le pignon à cueillir. L’oiseau chantera. Sans les béquilles d’un tronc qui
menace
les murs ; les ailes conduisent au détachement, tes pieds nus hier sur les
aiguilles
marquent ton territoire à défricher — la scie est ta maîtresse. Tu caresses
son
tranchant, perle le sang, gouttes éparses sur sol balayé. Demain a déjà été
hier,
dans les dents effilées de ton outil, dans les notes envoyées par l’oiseau
revenu, car
l’oiseau chantera. Entaille profonde ; attention à la direction de la chute :
la chaleur
du métal dissipe les gouttes de sueur, & puis les craquements, les bruits
annon-
ciateurs, gare ! L’oiseau chantera. Pour l’instant il observe, tes pieds
sanglés dans
des chaussures de sécurité, tes gants orange, l’absence d’ampoules de
contusions
de bleus — il te sait gré de ne pas avoir sollicité la tronçonneuse. L’oiseau
chantera.
Défrichera sa voix matinale pour pallier l’absence, guettera le piquant des
aiguilles
sur tes pieds à nouveau nus. Les broyats feront la joie du compost, les murs
s’épa-
nouiront sans l’ombre menaçante ; découpage au programme demain, &
aussi
pépiements roucoulements piaillements gazouillis, l’oiseau chantera & tu
seras
devant une tasse d’Earl Grey brûlant — la masse verte a raclé le sol, tu
pourfends
de ta scie, croisé mirifique de la place nette & des oiseaux en cage de
préférence.
L’oiseau chantera
vendredi 11 janvier 2019. Lien permanent Poèmes