Sercq, la fenêtre dans le rocher (photo : privée)

Retour sur une agréable lecture le 16 mars 2016, avec Antoine Cassar, au café littéraire Le Bovary, qui avait pour thème « Petites causeries sur les îles ».


En Sercq

Je cheminerai bien loin de Compostelle
là en Sercq où les sentiers noirs
de l’absence de la folie de voir
ouvrent le ciel à des oraisons d’étoiles

Je cheminerai bien loin des trottoirs humides
sur ces sentiers à l’arôme incertain
dans la lande abrupte menant à la fenêtre de roche
d’où lancent l’assaut les téméraires

    sous le couvert
    ruminent les tracteurs ailés
    bêtes de somme — ascenseurs fidèles
    ressac à pic sous la Coupée
    tranchant des rochers comme
    élan vaniteux d’embruns

Je cheminerai dans le silence du jour
à l’orée d’ajoncs et de pierres
humant l’absence de fiel
un parmi les bruits alentour

Je cheminerai pieds nus sur le gravier
coupures de brins aiguisés
ampoules de tant de quiétude
cors grondant leurs notes de fatigue

    et sous l’orage
    attendant l’accalmie
    je ferai le compte des inventions
    qui lient l’homme à son destin
    de forçat avide de biens
    gagnés à la sueur d’autres fronts

Je cheminerai de l’aube
au crépuscule du dernier bateau
trempant les orteils avec délectation
dans l’écorce des coquillages

Je cheminerai encore
à l’heure de quitter la Terre
pour mettre le cap sans regrets
vers Bételgeuse et Aldébaran.