Au Luxembourg mais aussi dans tout le monde francophone, celles et ceux qui aiment la poésie connaissent évidemment Anise Koltz. Une grande dame qui, du haut de ses 87 ans, fait figure de marraine de la poésie grand-ducale. C’est donc avec beaucoup d’à propos que Poésie Gallimard, pour ses 50 ans, a conçu une anthologie de la poétesse, première Luxembourgeoise à se voir ainsi honorer d’un titre dans cette collection de référence.

Lire la poésie d’Anise Koltz, c’est un peu comme la rencontrer : sous des abords timides dont seule la patience de son interlocuteur viendra à bout, on découvre des perles cachées. C’est elle-même qu’elle met en scène, tout en écrivant ce qu’elle ne saurait dire en public, avec force métaphores et images décalées. Ses poèmes sont courts et disent beaucoup en peu de mots ; presque des aphorismes quelquefois, tant la puissance d’une idée s’accole à une forme concise mais gratifiée d’un fin polissage pour la rendre terriblement efficace.

Avec Anise Koltz, pas de poésie expérimentale ou de variations infinies des formes : depuis son premier recueil, en 1966, elle a gardé un cadre relativement fixe mais sait y exprimer une large palette de thèmes, dont certains récurrents comme la mère, son époux décédé ou sa fascination pour la nature et les astres célestes. Tout cela sans qu’une fois le lecteur se lasse.

Un recueil essentiel chez Gallimard donc pour un aperçu de 50 ans de poésie, qui n’empêche pas de se plonger avec bonheur dans les éditions originelles des livres d’Anise Koltz pour encore plus de plaisir.

À lire aussi, mon article pour le woxx qui rend compte d’un récent entretien avec la poétesse luxembourgeoise.

Somnambule du jour, Poésie Gallimard, 2016


Mon langage
installé de longue date
comme le port d’Alexandrie
est marqué de commerce
il sent la contrebande

extrait de S’adonner au silence, 1983.

Chaque matin
après lui avoir brossé les ailes

Je range mon ange gardien
dans le placard

extrait d’Un monde de pierres, éditions Arfuyen, 2015.